Notre lettre 1057 publiée le 22 juin 2024

A QUIMPER

LA FRATERNITÉ SAINT-PIERRE

EST REMPLACÉE...

MAIS PAR QUOI AU JUSTE ?



ENQUÊTE

SUR LA PRISE DU POUVOIR LITURGIQUE

PAR MONSIEUR BRICOLAGE

Alors que les fidèles de St Sève et de Quimper ont organisé ce 16 juin une nouvelle manifestation qui a rassemblé encore une fois des centaines de personnes attachées au maintien des messes traditionnelles en Finistère et à la liberté liturgique, le diocèse de Quimper – qui devait former 12 prêtres diocésains, par ailleurs débordés, à la messe traditionnelle, est en pleine déconfiture. Et témoigne d'une désinvolture étonnante vis à vis de la messe, fusse-t-elle traditionnelle.

Plusieurs des prêtres censés célébrer la messe traditionnelle après y avoir été formés se seraient désistés. Par ailleurs, un mail du chancelier – et nouveau vicaire épiscopal chargé des fidèles de la messe tridentine – ou plutôt à leur éradication – aux curés qui sont censés se relayer pour célébrer cette messe, en date du 4 juin, témoigne d'une certaine improvisation.

Ainsi le chancelier explique avoir laborieusement trouvé « un deuxième exemplaire papier, pour St Sève, [du] lectionnaire papier de 1964 » en cherchant à travers toutes les sacristies du diocèse de Quimper, sans doute. Et renvoie les curés sur introibo.fr, ceremoniaire.net et misssel.fr pour préparer les messes, ainsi que le PDF du missel de 1962.

Le chanoine Queinnec n'a probablement pas pensé à regarder dans le catalogue de la bibliothèque diocésaine de Quimper, installée depuis 1977 dans la chapelle de l'évêché, rue de Rosmadec. Le catalogue – près de 270.000 références d'après Ouest-France, 100.000 ouvrages et encore 10.000 dans une annexe à Brest – est en ligne. Et il compte notamment un missel romain d'autel de 1938 et un autre de 1960, ainsi que d'après l'inventaire toujours une soixantaine de missels d'autels de diverses années.

Un long paragraphe, juste avant, renvoie au paragraphe 3 de l'article 3 de Traditionis Custodes au sujet des lectures, censées être issues de la traduction officielle liturgique de la Bible en 2013, avant de s'en affranchir immédiatement : « Lato sensu, on peut estimer que le lectionnaire de 1964 était une traduction liturgique, approuvée par la Conférence épiscopale, donc autorisée ».

Le diocèse de Quimper, dans une improvisation qui semble totale, va virer la Fraternité Saint-Pierre et la remplacer par... des messes vetus ordo avec des lectures « en langue vernaculaire », autrement dit en français, tirées du lectionnaire de 1964. Et sans offertoire pour que les pauvres curés débordés, « qui font des efforts » dixit Mgr Dognin, ne soient pas complètement perdus. Autrement dit, c'est à la messe de faire des efforts, pas aux curés qui la célèbrent.

« Le diocèse de Quimper se bat héroïquement avec des problèmes qu'il s'est créé lui même »

Ledit mail du chanoine Queinnec et le bazar qui prévaut au remplacement de la Fraternité Saint-Pierre dans le diocèse de Quimper n'ont pas manqué de faire réagir les fidèles concernés.

« C'est du foutage de gueule intégral ! », tempête un fidèle morlaisien. « Donc ils virent nos prêtres sur un prétexte complètement artificiel, ils suppriment sacrements, catéchismes et activités car ils sont incapables de les assurer et même pour célébrer la messe – la messe ! - ils s'avèrent complètement incapables et improvisent. Evidemment dans notre dos, et ils vont encore s'indigner qu'on s'indigne. C'est du n'importe quoi à l'état chimiquement pur ! »

Plus nuancé, un fidèle du sud-Finistère constate que « le diocèse de Quimper se bat héroïquement avec des problèmes qu'il s'est créé lui même. Comme on dit dans les pays de l'Est, les souris pleuraient, se piquaient, mais continuaient à grignoter le cactus ».

Un autre habitué de la paroisse de Quimper relève qu'il est « difficile de parler d'une relation de confiance avec le diocèse dans ces conditions ; il y a des diocèses voisins qui sont très impliqués dans les dévotions locales, les pardons – ici, on les plante les uns après les autres, et quand le diocèse intervient, c'est pour soutenir les curés contre les bénévoles et les fidèles, par cléricalisme.

Il y a des diocèses Bretons qui ont une relation de confiance avec leurs fidèles, ici, sous prétexte que certains de leurs curés portent des noms bien du coin – ou qui rappellent des scandales passés, d'ailleurs – le diocèse se comporte comme une administration en déliquescence, qui ne fait rien et ça ira bien comme ça, de toute façon si vous n'êtes pas content c'est pareil, on fera dans votre dos, ça ne va pas marcher, et on s'en fout. Pas étonnant qu'une très large majorité de la population ne pratique plus ».

Le n'importe quoi liturgique intégral, marque de la religion synodale ?

Tout donner pour la messe, rien n'est trop beau pour Dieu ? L'attachement du saint curé d'Ars pour la sainte Messe n'est certainement pas de mise dans le diocèse de Quimper.

Ce dernier semble plus proche de la messe présidée par le cardinal Roche après son colloque à Paris début février sur la liturgie et censée en réfléter la quintessence [notre lettre n°1003] : « l'orgue faisait des couacs, la chorale des fausses notes – mention spéciale à la choriste trois tons à côté à chaque envoi – l'homélie (pas par le cardinal Roche) de cinq minutes montre en main, pour faire comprendre que ladite liturgie, moitié Kyriale, moitié chants modernos, c'était l'aboutissement de leur colloque.

Bah ils n'ont pas été déçus. Le gloria à peine suivi par l'assistance, le psaume 23 la chorale en a pris un couplet sur quatre, le chant de sortie ils l'ont oublié, en revanche là où le cardinal Roche a fait fort, c'est réussir à faire chanter à une assemblée de chrétiens issue du Concile le notre Père en latin. Ca valait certainement la peine de faire la guerre aux tradis pour ça, votre Eminence ».

Dans le diocèse de Quimper, on fait encore mieux. La Fraternité Saint-Pierre est virée, et remplacée... par quoi au juste ?

Même s'il est manipulé, le nom de Mgr Dognin restera attaché à la déconfiture du diocèse de Quimper

Les proches de Mgr Dognin ont beau jeu de le dédouaner en permanence – il est sincère, il est de bonne volonté, mais il serait pieds et poings liés par la « tribu bigoudène », le clan à la tête du diocèse depuis des décennies et qui décide de tout, à la place des évêques, et sur le dos des fidèles en général – d'où l'effondrement de la pratique et des vocations dans le diocèse. Néanmoins c'est bien le nom de Mgr Dognin qui restera attaché pour l'avenir à la déconfiture du diocèse de Quimper.

Ainsi, en 2021 dans le trombinoscope des évêques de Golias, c'est Mgr Dognin, et non les abbés Queinnec, Larnicol, Guiziou, Croguennec, Larvol, Quemeneur etc. qui est épinglé car il « avance sans prudence en accueillant une communauté brésilienne dans le collimateur des associations qui surveillent les dérives sectaires […] la communauté brésilienne Palavra Viva vient en Finistère fonder une école d'évangélisation exclusivement pour les garçons ».

Cette communauté, fondée en 1995 dans la région de Sao Paulo, évangélise en musique avec des guitares, à destination de la jeunesse. Quand Mgr Dognin – ou plutôt la tribu qui tire les ficelles de l'évêque-pantin – y font appel, elle est présente dans les diocèses de Bayonne, Toulon, Avignon, Cambrai, Périgueux, ou encore Aix. Elle vient tout juste de quitter le diocèse de Gap où Mgr Malle passe la wassingue après les excès de son prédécesseur. Elle n'est pas suspecte de traditionalisme – même si elle manque singulièrement d'épaisseur, cela semble être une bonne idée de lui confier l'ancienne école ménagère de Créac'h Balbe, rachetée, comme l'explique le Télégramme le 4 juin 2010 du temps de Mgr le Vert pour en faire un centre spirituel, et que le diocèse a tant de mal à faire vivre.

Du coup le diocèse communique ; quelques jours avant le premier confinement, tout va dans le meilleur des mondes – dans Ouest-France du 12 mars 2020 cinq membres de la communauté Palavra Viva, cornaqués par un certain Vivo Anderson, 37 ans, et Brenno Alves, 27 ans, vont promettre monts et merveilles. Un interview paraît même sur le site du diocèse. Puis, plus rien.

C'est la feuille paroissiale de Landerneau du 24 mars 2022 qui vend la mèche : « depuis le départ des frères brésiliens de Palavra Viva beaucoup s'interrogent sur l'avenir de Créac'h Balbe. Le diocèse vient d'en confier la charge pour un an à l'association Estival, liée aux frères de Ploërmel » pour accueillir des groupes de jeunesse pendant les vacances.

Et le diocèse de Cambrai – qui semble moins versé dans le cléricalisme ou qui semble attaché à informer ses fidèles explique la raison de l'absence de la communauté qui faisait vivre la maison diocésaine de Raismes dans un communiqué du 15 février 2022 : « la communauté qui résidait à Raismes à rejoint avec l'ensemble des communautés dans le monde son lieu de fondation au Brésil pour une relecture de l'activité missionnaire et un ressourcement spirituel de six à dix mois […] la pandémie a déstabilisé en profondeur un certain nombre de membres qui ont quitté la communauté après son retour au Brésil ».

Bref, exit les brésiliens. Et pour s'informer, les fidèles de Quimper doivent compter sur le diocèse... de Cambrai, dont l'évêque n'est pas une marionnette. Cependant, pour la postérité, c'est le nom de Mgr Dognin qui reste attaché à cet échec – et aux autres – tandis que les membres du conseil presbytéral, du collège des consulteurs et autres soviets suprêmes, qui décident de tout et surtout des nominations, vont le regarder s'enfoncer et couler, en lui promettant d'être démissionné comme son prédécesseur Mgr le Vert s'il manque de zèle à défendre leurs quatre volontés.

Monseigneur Dognin l'a bien compris. Il a déclaré à l'un des abbés de la FSSP qu'il chasse : « c'est ma tête ou la vôtre ». En ces temps où certains veulent ressortir les guillotines pour épurer les opposants – tout le monde est le « facho » ou le « tradi » de quelqu'un d'autre, que d'autres espèrent qu'une rue Robespierre dans chaque ville de France effacera automatiquement la dette et apurera les déficits, et que contraindre les fidèles de la messe en latin à revenir aux catacombes comme les chrétiens des premiers temps résoudra les crises et les abus dans l'Eglise, ce sont hélas les deux têtes qui risquent de rouler... et combien d'autres ?  

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