Notre lettre 1141 publiée le 19 décembre 2024
RÉOUVERTURE DE NOTRE-DAME
MGR ULRICH INAUGURE...
QUOI AU JUSTE ?
Comme pour la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques où des milliards d'humains ont pu voir en direct ce que la France n'était plus, les dizaines de millions de téléspectateurs qui ont vu la retransmission de la cérémonie d'ouverture de Notre-Dame de Paris ont pu voir ce que la religion catholique n'était plus – ornements atrocement multicolores, autel et ambon en forme de coupe sombre, mobilier liturgique et orfèvrerie d'un modernisme plat tranchaient littéralement sur la magnificence intemporelle de la cathédrale gothique – sur le plan de la beauté, de l'enracinement et de la rigueur, les Anciens l'emportent avec panache sur les modernes.
Devant les Grands de ce monde assemblés, les maîtres de cérémonie auraient pu saisir l'occasion pour proclamer l'évangile, la paix, la charité, le Salut. Il n'en fut rien, ce qui n'échappa pas aux critiques des modernes, comme le frère Bernard Marie: « Cet office était à peine chrétien et outre les remerciements légitimes exprimés à tous, il s'est résumé pour moi à une inauguration de l'orgue. Tourné vers l'orgue plutôt que vers Marie et Jésus.
Dans cette cathédrale, ce n'est pas l'orgue qui est sacré... et cet orgue orgueilleux s'est contenté de faire du bruit, il nous a servi une soupe quasiment indifférenciée après chacune de vos interpellations faisant valoir sa seule volonté de puissance... Où était l'humilité de l'humble servante et celle de celui qui est doux et humble de cœur ? Un office tourné vers le fond de la cathédrale plutôt que vers Marie et la Croix.
Une liturgie de la Parole quasiment inexistante hormis ce passage convenu de St Paul parlant de construction. Pas même un Alléluia, pas une page d'Evangile (les béatitudes par exemple) et encore moins de Magnificat sans doute trop "révolutionnaire" pour être chanté ou proclamé devant les puissants de ce monde et bien sûr aucune prédication. Rien non plus dans la perspective de Noël où nous célébrons la naissance du Prince de la Paix... Il y avait un message à faire passer face à notre monde qui brûle... l'incendie de Notre Dame aurait pu être mis en regard de ce monde à feu et à sang.
Et je ne parle pas de ces ornements carnavalesques dont Mr de Castelbajac vous a affublé. N'eut il pas été plus judicieux de revêtir une simple chasuble bleue aux couleurs de la Vierge Marie imprimée d'une simple Croix en or plutôt que de céder cette arlequinade ?... On n'était pas à la fashion week! Je regrette cette Eglise mondaine aux relents de triomphalisme qui n'a plus le courage de proclamer devant les grands de ce monde l'Evangile du Christ et de Marie ».
Les orthodoxes : « à quoi est dédiée Notre-Dame ? A la Vierge Marie ou à l'état français ? »
Les auteurs du centre des journalistes orthodoxes (SPZH) sont aussi longuement revenus sur la cérémonie d'inauguration en répondant au passage à l'article qu'ils avaient écrit il y a cinq ans lors de l'incendie de Notre-Dame. Revenant sur les interventions des uns et des autres, ils ont cité celle d'Emmanuel Macron – qui au passage a bien profité de la tempête pour parler dans la cathédrale, et non en-dehors comme le justifiait pourtant la loi de 1905.
« La fin du discours d'Emmanuel Macron était triomphante : ''Cette cathédrale fut la métaphore heureuse de ce qu'est une nation et ce que devrait être le monde […] Notre-Dame nous dit que nos rêves, mêmes les plus audacieux, ne sont possibles que par la volonté de chacun, et l'engagement de tous […] Notre cathédrale nous dit combien le sens, la transcendance, nous aident à vivre dans ce monde. Transmettre et espérer […] Les cloches vont sonner, l'orgue va s'éveiller, les fidèles bientôt viendront prier. Le monde retrouvera la cathédrale rebâtie et embellie. Et nous, il nous faudra garder comme un trésor cette leçon de fragilité, d'humilité et de volonté, et n'oublier jamais combien chacun compte, et combien la grandeur de cette cathédrale est inséparable du travail de tous ».
« Cette phrase « les fidèles viendront prier » est quasiment la seule mention d'un aspect religieux dans ce discours de réouverture », relèvent les journalistes du SPZH. « De belles paroles sur la grandeur de la culture française, sur l'héritage historique, la bravoure des sauveteurs et l'ardeur au travail des ouvriers chargés de la restauration. Mais il n'y a pas un mot sur la religion chrétienne, sur le Sauveur, la Vierge [si ce n'est la Vierge au Pilier, « intacte, immaculée » après l'incendie - NDLA] Le président français a achevé son discours avec trois exclamations, « vive Notre-Dame de Paris, vive la République, vive la France ». Mais une question logique se pose : à quoi est dédiée cette cathédrale ? A la Vierge Marie ou à l'état français ? Est-elle le symbole de la grandeur du Christ ou de la Nation ? ».
Et ils poursuivent par le discours de Mgr Ulrich, « qui s'achève sur ces mots : ''vous qui entrez ici, soyez bienvenus ; que vous soyez chrétiens ou non, croyants ou non, la Vierge Marie vous tend ses bras''. Du point de vue diplomatique mondain, c'est très juste. Venez tous, regardez combien la cathédrale est belle, laissez vous étonner par les vitraux et les fresques, les colonnes et les statues. Mais encore une fois, qu'en est-il de la foi dans le Christ, de l'évangélisation chrétienne ? Et que dire du fait que Notre-Dame a été construite en fait pour y célébrer une liturgie où tous ne peuvent pas venir, mais seulement ceux qui sont fidèles au Christ ? »
Du reste, les auteurs orthodoxes de SPZH concluent : « la restauration de la cathédrale Notre-Dame n'est pas un symbole de la renaissance de la chrétienté [en Europe] Les désaffections d'églises continuent, les gay-pride rassemblent des dizaines de fois plus de participants que les messes, les blasphèmes publics contre la Foi sont de plus en plus forts. Quant à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame restaurée, elle symbolise les réalisations politiques de Macron, les possibilités financières des milliardaires français, la fierté nationale, la grandeur de la culture etc. Tout ce qu'on veut sauf le retour de la France à la foi chrétienne »
Ils célèbrent ce qu'ils sont en train de détruire
Renaissance catholique a aussi fait une critique au vitriol de la cérémonie et des présents, qui ont écouter célébrer ce qu'ils sont en train de détricoter méticuleusement – l'héritage chrétien de la France, sa grandeur, sa culture ou sa bravoure : « comme autour de la Mamma chantée par Charles Aznavour ils sont venus, ils sont tous là, aux pieds de Notre-Dame : les avorteurs artisans de la constitutionnalisation de l’avortement, les invertis exposant leur compagnon dans la presse people, tous ceux qui depuis des décennies s’acharnent à détruire l’héritage chrétien immatériel de la France (mœurs, habitudes, institutions) dont la cathédrale Notre-Dame de Paris est le plus bel, et emblématique, témoignage matériel.
Y a même Manu, le fils prodige, peut-être un jour prodigue, figé en un sourire quasi permanent de satisfaction de lui-même. Seules quelques rares personnalités (Henri d’Anselme- le héros au sac à dos-, le prince Jean de France, son épouse et son fils) paraissent conscientes de la nature réelle de l’événement et de sa signification alors que la grande masse des participants ne peut qu’être étrangère à un héritage qu’elle est incapable intellectuellement de comprendre et spirituellement de vivre ».
Un cirque mondain et tapageur qui fait l'impasse sur le tabernacle et Jésus Christ
Alors que la cérémonie compte deux absents de marque – le pape François et la cause de l'incendie, puisque quatre ans et demi plus tard l'enquête piétine toujours, les couleurs des ornements liturgiques, tape à l'œil et bien peu enracinées dans la Tradition liturgique, sont censées faire oublier le grand vide qui anime tous ces Grands.
« Les vêtements liturgiques portés par les concélébrants (170 évêques, 106 prêtres) et conçus par le styliste Jean-Charles de Castelbajac dans une optique très colorée et arc en ciel ont suscité bien des interrogations : Clin d’œil au défilé de mode ecclésiastique du film de Federico Fellini Roma ? Publicité gratuite pour Google, Liddle ou Uno ? Réminiscences enfantines de Pierrot ou Polichinelle ? Certains ont évoqué le cirque Zavatta. Chacun se perd en conjectures.
Ce qui est certain c’est que si cet accoutrement n’était guère en phase avec la solennité des lieux il s’accordait tout à fait à l’ambiance générale de la cérémonie : à la fois digne par sa solennité mais aussi très « laïque » et festive dans son déroulement. […] Plus qu’à la gravité, à la transcendance, à la verticalité, au recueillement l’heure semblait aux mondanités et aux familiarités entre puissants de ce monde : Brigitte Macron embrassant comme du bon pain le recteur de la cathédrale Mgr Ribadeau Dumas qui l’accueillait à l’entrée de la cathédrale, son mari multipliant sourires et poignées de main, le tout dans un brouhaha qui semblait faire l’impasse sur la présence dans le tabernacle de Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, maître de l’univers et juge des vivants et des morts ».
Il est vrai que là haut, Macron, Brigitte, la femme de Biden ou tel ou autre acteur n'ont aucune autorité. Alors qu'ici bas ils peuvent noyer les symboles religieux et la foi dans le brouhaha et les belles paroles, au moins le temps d'une heure ou deux, pour oublier leur finitude.
Inaugurer Notre-Dame ou Macron ? Le pape François ne marche pas dans la combine
En tout cas, si les Grands ont oublié leur finitude, et l'ambiance fin de règne qui a cours actuellement en France et au sein de « l'Occident collectif », le peuple ne les a pas oublié. C'est ainsi que l'extrême-gauche, sur fond de crise économique et politique, brocarde sans réserves cette cérémonie en l'honneur d'un seul homme : c'est Emmanuel Macron que l'on inaugurait, à grands frais :
« Tout comme pour la cérémonie d’ouverture des JO, une débauche de moyens a été employée pour faire de cette cérémonie un événement marquant. Dix millions d’euros, un tiers financé sur fonds publics, le reste par le diocèse de Paris via le mécénat. Et oui, faire venir Pharell Williams ou Vianney, Nicolas Sarkozy, Hollande, des duchesses anglaises et des centaines d’autres bourgeois venus en jet privé, et leur offrir un dîner à l’Élysée, ça coûte cher. Le tout encadré par pas moins de 6.000 policiers, un pognon de dingue. La nécessité de faire des économies ? C’est bon pour la plèbe!
À l’époque de l’incendie, en avril 2019, l’événement avait détourné l’attention de la révolte des Gilets jaunes : le feu dans la charpente était devenu LE drame qui servait à fabriquer une union nationale autour d’un symbole religieux […] Plus d’une cinquantaine de chefs d’État étaient présents. Rencontre hautement symbolique, Macron a pu se faire photographier entre Trump et le président ukrainien Zelensky, invité surprise. Il s’agit de la première rencontre entre les deux hommes politiques depuis l’élection de Trump […] Si Macron s’est longuement fait photographier au milieu de dirigeants étrangers, c’est justement parce qu’il a complètement détruit la diplomatie française et anéanti la voix de la France sur la scène internationale, par ses outrances, ses mensonges et ses revirements ».
Le pape François en Corse, l'anti-ouverture de Notre-Dame
D'ailleurs le Pape François a été un absent de marque. Refusant de participer à un show politique chargé de conforter Emmanuel Macron alors que la France est engluée dans une crise politique, sociale et financière qu'il a lui-même déclenchée et prolongée, il est allé une semaine plus tard clôturer un colloque sur la foi populaire en Corse, cette foi ouverte à tous, a béni un bébé endormi, une pizza, et s'est assis sur un mobilier moderne mais réalisé avec goût – par les ateliers de charpente de l'association SOS Calvaires, au nord de l'Anjou et dans l'Indre.
De fait, son passage a aussi coûté un « pognon de dingue », 2 millions d'euros d'après la presse corse, le coût de la construction de l'église neuve de Porticcio que le diocèse ne peut pas se payer, ou deux ans et demi de déficit courant de l'Eglise en Corse – certes, la moitié de la somme a déjà été recueillie via des dons de fidèles ou d'entreprises. Mais ça reste très cher pour à peine dix heures de voyage papal.
Mais cette fois, la Foi était au centre, et au milieu de toutes les attentions, le Pape François. Tous l'ont vu et il les a vu tous, le peuple de Dieu corse, rassemblé autour de son cardinal-évêque dans une messe qui a réuni 15.000 fidèles... et c'est Macron qui a du aller au Pape pour le rencontrer à la fin de la journée. Avait-il mis sa plus belle chemise et la clé de Notre-Dame de Paris autour du cou ?
Derrière la dissonance des couleurs, la cacophonie de l'orgue
Les couleurs de la paramentique, censées être au service d'une cérémonie et non l'occulter, ont fait beaucoup parler d'elles, et ont inspiré nombre de détournements sur le net, de par leur ressemblance avec celles de Google ou du discounter Lidl. On voit ainsi un homme avec une crosse semblable à celle de Mgr Ulrich toquer à la porte d'un Lidl, et bien d'autres gags.
La presse s'est pourtant chargée de faire le service après vente du couturier : « le méticuleux travail de Castelbajac est tout en symboles. «?En écho aux vitraux (eux aussi objet de polémiques) la couleur est omniprésente sur les chasubles blanches, autour de la croix d’or?», livre-t-il en guise d’explications. Ainsi, le vert renvoie à l’espoir. Le rouge est «?la couleur du sang versé par amour pour le Christ et les martyrs, la couleur du feu de l’Esprit Saint?». Le jaune est une teinte festive quand le bleu est la couleur associée à la Vierge Marie, rappelle le diocèse de Paris ».
Mais s'il a été précisé qu'un mécène a tout payé, il manque le coût. Autre précision importante passée à la trappe : Castelbajac a tout simplement recyclé sa gamme chromatique chez Benetton et les couleurs de sa paramentique pour les JMJ de Paris en 1997. En cherchant un peu pourtant, l'on tombe sur un article d'Ouest-France du 5 décembre dernier : « les bandes, très osées, ornées des couleurs de l'arc en ciel dans le dos de 500 évêques […] pour les journées mondiales de la jeunesse à Paris en 1997 : son œuvre aussi.
Repéré à l'époque par le cardinal Jean-Marie Lustiger, il raconte avoir débarqué à l'archevêché avec ses croquis et ses couleurs sous les bras. Les couleurs, précise-t-il, de ''l'arc en ciel, kidnappé en Normandie''. Ce prisme est celui du ''drapeau de la paix, du ciel qui relie Dieu et les hommes, celles du peuple de demain, et aussi de la communauté LGBT'', expose-t-il à l'épiscopat, affirmant tout de go qu'il n'aura ''pas d'autre proposition'' ». Voilà qui est plus clair...
Nombre d'auditeurs ont aussi relevé la discordance des orgues – et le maladroit rattrapage des communicants, qualifiant cela d '« improvisations ». Cet été les organistes de Notre-Dame ont pourtant fait la Une, peu avant les grandes vacances : le père Olivier Ribadeau Dumas a nommé quatre organistes titulaires de Notre-Dame, suscitant une très forte polémique et une pétition signée par 3800 organistes dont les plus grands, les titulaires d'orgues de cathédrales et autres sommités.
France 24 revenait alors sur la polémique : « beaucoup s'attendaient en effet à la reconduction de l'ancienne équipe. Si Olivier Latry et Vincent Dubois ont bien été rappelés, Johann Vexo, au clavier au moment du sinistre et Philippe Lefebvre, figure historique du grand orgue – en poste depuis 1988 –, ont été écartés. Le cas de Philippe Lefebvre, 75 ans, sommité mondiale du monde de l'orgue et poussé ici sans ménagement à la retraite, a particulièrement choqué. "Pourquoi ne pas avoir proposé à Philippe Lefebvre de rester à la tribune au moins quelques mois pour participer, aux côtés de ses collègues, aux cérémonies de réouverture de la cathédrale ?" s’interroge la pétition intitulée "Notre-Dame de Paris à nouveau en feu" »
Outre cette indélicatesse indubitable, le choix de nommer parmi les quatre titulaires un organiste de 21 ans encore en étude, jusque là titulaire d'un orgue dans le XVe arrondissement de Paris, ne passe pas : « cet organiste de 21 ans, encore étudiant au Conservatoire de Paris (CNSMDP), n'a aucun diplôme et accède au Saint des saints en devenant titulaire-adjoint du grand orgue, sans même avoir eu à passer de concours ». Face aux critiques, le père Ribadeau-Dumas avait refusé de se remettre en cause, affirmant qu'un concours n'était « pas opportun » et le choix du jeune organiste – dont il serait, selon certains initiateurs de la pétition, proche, « délibéré ». Le diocèse a même qualifié la pétition et les opposants de « méthodes qui ne sont pas dignes ».
Que tous se taisent ! Le choix du jeune organiste, des couleurs de la paramentique, de l'autel en forme de coupe sombre, d'une cérémonie politique qui soit plutôt à la gloire d'un roi bâtisseur en fin de règne qu'une messe, fut-elle solennelle, des vitraux modernes, de passer sous silence l'absence du Pape et de la cause de l'incendie sont le fait du Prince. Mais la dissonance des couleurs, de l'orgue et des éléments modernes dans le gothique millénaire montrent à eux seuls que quelque chose cloche. Mais quoi ?